<281>et, de la science des rois jusqu'à la musique et à l'art de la peinture, quelle carrière ne remplissez-vous pas! Quel présent de la nature n'avez-vous pas embelli par vos soins!
Mais quoi! monseigneur, il est donc vrai que V. A. R. a un frère digne d'elle? C'est un bonheur bien rare; mais, s'il n'en est pas tout à fait digne, il faudra qu'il le devienne, après la belle Épître de son frère aîné; voilà le premier prince qui ait reçu une éducation pareille.
Il me semble, monseigneur, qu'il y a eu un des électeurs, vos ancêtres, qu'on surnomma le Cicéron de l'Allemagne; n'était-ce pas Jean II? V. A. R. est bien persuadée de mon respect pour ce prince; mais je suis persuadé que Jean II n'écrivait point en prose comme Frédéric; et, à l'égard des vers, je défie toute l'Allemagne, et presque toute la France, de faire rien de mieux que cette belle Épître.
O vous en qui mon cœur, tendre et plein de retour,
Chérit encor le sang qui lui donna le jour!
Cet encor me paraît une des plus grandes finesses de l'art et de la langue; c'est dire bien énergiquement, en deux syllabes, qu'on aime ses parents une seconde fois dans son frère.
Mais, s'il plaît à V. A. R., n'écrivez plus opinion par un g, et daignez rendre à ce mot les quatre syllabes dont il est composé; voilà les occasions où il faut que les grands princes et les grands génies cèdent aux pédants.
Toute la grandeur de votre génie ne peut rien sur les syllabes, et vous n'êtes pas le maître de mettre un g où il n'y en a point. Puisque me voici sur les syllabes, je supplierai encore V. A. R. d'écrire vice avec un c, et non avec deux ss. Avec ces petites attentions, vous serez de l'Académie française quand il vous plaira, et, principauté à part, vous lui ferez bien de l'honneur; peu de ses académiciens s'expriment avec autant de force que mon prince, et la grande raison est qu'il pense plus qu'eux. En vérité, il y a dans votre Épître un portrait de la