<253>Ne vous forgez donc pas des monstres pour les combattre. Ferraillez, s'il le faut, avec les ennemis réels que votre mérite vous a faits en France, et ne vous imaginez pas d'en trouver où il n'y en a point; ou, si vous aimez les tracasseries, ne m'y mêlez jamais; je n'y entends rien, ni ne veux jamais rien y entendre.
Je vois, par tous les arrangements que vous prenez, le peu d'espérance qu'il me reste de vous voir. Vous ne manquerez pas d'excuses; une imagination aussi vive que la vôtre est intarissable. Tantôt ce sera une tragédie dont vous voudrez voir le succès, tantôt des arrangements domestiques; ou bien le roi Stanislas, ou de nouveaux on dit. Enfin je suis plus incrédule sur ce voyage que sur l'arrivée du Messie, que les Juifs attendent encore.
Il paraît ici une Élégie ...; serait-elle de vous? Voici le premier vers :
Un sommeil éternel a donc fermé ces yeux, etc.
Mandez-le-moi, je vous prie; j'ai quelques doutes là-dessus; vous seul pouvez les éclaircir.
J'attends avec impatience le grand envoi que vous m'annoncez, et je vous admirerai, tout ingrat et absent que vous êtes, parce que je ne saurais m'en empêcher.
Adieu; je vais voir les agréables folies de Roland,a et les héroïques sottises de Coriolan.b Je vous souhaite tranquillité, joie et longue vie.
a L'opéra d'Angélique et Médor, musique de Graun, représenté pour la première fois le 27 mars 1749. Le sujet de cette pièce est tiré du Roland furieux de l'Arioste.
b L'opéra de Coriolan, musique de Graun, représenté pour la première fois le 19 décembre 1749. Voyez t. XVIII, p. 71, 72 et 74.