<5>J'avais commencé une Epître sur les abus de la mode et de la coutume, lors même que la coutume de la primogéniture m'obligeait de monter sur le trône et de quitter mon Épître pour quelque temps. J'aurais volontiers changé mon Epître en satire contre cette même mode, si je ne savais que la satire doit être bannie de la bouche des princes.
Enfin, mon cher Voltaire, je flotte entre vingt occupations, et je ne déplore que la brièveté des jours, qui me paraissent trop courts de vingt-quatre heures.
Je vous avoue que la vie d'un homme qui n'existe que pour réfléchir, et pour lui-même, me semble infiniment préférable à la vie d'un homme dont l'unique occupation doit être de faire le bonheur des autres.
Vos vers sont charmants. Je n'en dirai rien, car ils sont trop flatteurs.
Mon cher Voltaire, ne vous refusez pas plus longtemps à l'empressement que j'ai de vous voir. Faites en ma faveur tout ce que vous croyez que votre humanité comporte. J'irai à la fin d'août à Wésel, et peut-être plus loin. Promettez-moi de me joindre, car je ne saurais vivre heureux ni mourir tranquille sans vous avoir embrassé. Adieu.
Mille compliments à la marquise. Je travaille des deux mains, d'un côté à l'armée, de l'autre au peuple et aux beaux-arts.