<63>Rhin ou dans la Meuse, entre lesquels je me trouve renfermé, et qui se débordent de leur mieux. Je serai puni par le déluge d'avoir quitté mon roi; je vais, si je puis, me réfugier à Clèves; je me flatte que ses troupes auront trouvé de meilleurs chemins. Pour S. M., elle a trouvé le chemin de la gloire de bien bonne heure. J'entrevois de bien grandes choses; mon roi agit comme il écrit. Mais se souviendra-t-il encore de son malheureux serviteur, qui s'en est allé presque aveugle,a et qui ne sait plus où il va, mais qui sera jusqu'au tombeau, avec le plus profond et le plus tendre respect, etc.
158. DU MÊME.
Clèves, 15 décembre 1740.
Grand roi, je vous l'avais prédit,
Que Berlin deviendrait Athèneb
Pour les plaisirs et pour l'esprit;
La prophétie était certaine.
Mais quand, chez le gros Valori,
Je vois le tendre Algarotti
Presser d'une vive embrassade
Le beau Lugeac,c son jeune ami,
Je crois voir Socrate affermi
Sur la croupe d'Alcibiade;
Non pas ce Socrate entêté,
De sophismes faisant parade,
A l'œil sombre, au nez épaté,
A front large, à mine enfumée;
a Voltaire avait une ophthalmie, en quittant Berlin.
b Voyez t. XXI, p. 53, 55, 432 et 433.
c Charles-Antoine de Guérin, connu sous le nom de marquis de Lugeac.