Vivre et mourir auprès de vous,
C'eût été pour moi trop prétendre;
Et si mon sort est trop peu doux,
C'est à lui que je veux m'en prendre.
Sire, il est clair que vous avez trop de tout, et moi trop peu. Votre Épître à madame de Morrien sur ce sujet est charmante. Il y a plus de trente ans que vous m'étonnez tous les jours. Je conçois bien comment un jeune Parisien oisif peut faire de jolis vers français, quand il n'a rien à faire le matin que sa toilette; mais qu'un roi du Nord, qui gouverne tout seul une vingtaine de provinces, fasse sans peine des vers à la Chaulieu, des vers qui sont à la fois d'un poëte et d'un homme de bonne compagnie, c'est ce qui me passe. Quoi! vous nous battez en Thuringe, et vous faites des vers mieux que nous! C'est là qu'il y a du trop; et vous me causez trop de regrets de ne pas mourir auprès de Votre Majesté héroïque et poétique.
415. A VOLTAIRE.a
(3 avril 1770).
De Chaulieu l'épicurien
Je n'eus point en don le génie;
Mais la goutte qui me retient Sur mon grabat à l'agonie
Vient par sa généalogie
De la même dont fut atteint
Cet aimable Sybaritain.
a Les vers de cette pièce sont tirés des Œuvres posthumes, t. VIII, p. 102 et 103; la prose, du même recueil, t. X, p. 56 et 57. Nous avons imprimé les vers t. XIII, p. 32.