<249>Je remercie V. M. de remettre dans la règle le célèbre couvent d'Oliva; car le bruit court que vous êtes prieur de cette bonne abbaye, et que dans peu tous les novices de ce couvent feront l'exercice à la prussienne. Je ne m'attendais, il y a deux ans, à rien de tout ce que je vois. C'est assurément une chose unique que le même homme se soit moqué si légèrement des palatins pendant six chants entiers, et en ait eu un nouveau royaume pour sa peine. Le roi David faisait des vers contre ses ennemis, mais ses vers n'étaient pas si plaisants que les vôtres; jamais on n'a fait un poëme ni pris un royaume avec tant de facilité. Vous voilà, Sire, le fondateur d'une très-grande puissance; vous tenez un des bras de la balance de l'Europe, et la Russie devient un nouveau monde. Comme tout est changé! et que je me sais bon gré d'avoir vécu pour voir tous ces grands événements!
Dieu merci, je prédis et je dis, il y a plus de trente ans, que vous feriez de très-grandes choses; mais je n'avais pas poussé mes prédictions aussi loin que vous avez porté votre très-solide gloire; votre destin a toujours été d'étonner la terre. Je ne sais pas quand vous vous arrêterez; mais je sais que l'aigle de Prusse va bien loin.
Je supplie cet aigle de daigner jeter sur moi chétif, du haut des airs où il plane, un de ces coups d'œil qui raniment le génie éteint. Je trouve, si votre médaille est ressemblante, que la vie est dans vos yeux et sur votre visage, et que vous avez, comme de raison, la santé d'un héros.
Je suis à vos pieds comme il y a trente ans, mais bien affaibli. Je regarderai le Regno Redintegrato quand je voudrai reprendre des forces.
Votre vieux idolatre.