<301>Je n'aime point du tout, il est vrai, votre métier de héros, mais je le révère; ce n'est point à moi de juger de la Tactique de M. Guibert. Je ne m'entends point à ces belles choses; je sais seulement qu'il vous regarde, avec raison, comme le premier tacticien; et moi j'ajoute, comme le premier politique; car vous venez d'acquérir un beau royaume sans avoir tué personne, et non seulement vous voilà pourvu d'évêchés et d'abbayes, non seulement vous voilà général des jésuites après avoir été général d'armée, mais vous faites des canaux comme à la Chine, et vous enrichissez le royaume que vous vous êtes donné par un trait de plume. Que vous reste-t-il à faire? Rien autre chose que de vivre longtemps pour jouir.
Comme V. M. recevra probablement mon petit paquet aux bonnes fêtes de Noël, et que le Dieu de paix va naître avant qu'il soit trois semaines, je me recommande à lui, afin qu'il obtienne ma grâce de vous, et que vous me pardonniez toutes les pouilles que j'ai dites à V. M., et la haine cordiale que j'ai pour votre métier de César. Ce César, comme vous savez, pardonnait à ses ennemis quand il les avait vaincus; et vous aurez pour moi la même clémence, après vous être bien moqué de moi.
Le vieux malade de Ferney, qui s'égaye quelquefois dans les intervalles de ses souffrances, se met à vos pieds avec cinq ou six sortes de vénérations pour vos cinq ou six sortes de grands talents, et pour votre personne qui les réunit.