<364>je serai sa dernière ressource. Un ingénieur formé sous les yeux de Voltaire est un phénix à mes yeux. Pour cette bataille dont il a tracé le plan, il y a si longtemps qu'elle s'est donnée, qu'à peine je m'en ressouviens. D'Étallonde pourra vous servir à conduire les travaux au siége de l'infâme, à former les batteries des balistes et des catapultes, pour faire écrouler entièrement la tour de la superstition, dernier asile des vieilles femmes et des tonsurés.a
Je vois que vous préférez le séjour de Ferney à celui de Versailles; vous le pouvez faire sans risque. Les distinctions que vous pourriez recevoir de votre ingrate patrie tourneraient plus à son honneur qu'au vôtre. Vous ne recevrez pas l'immortalité comme un don; vous vous l'êtes donnée vous-même.
Les bonnes intentions de la reine de France font cependant son éloge : il est beau qu'une jeune princesse pense à réparer les torts d'une nation dont elle occupe le trône, surtout qu'elle rende justice au mérite éclatant.
Ce portrait que vous avez voulu avoir, et qui est plus propre à déparer qu'à orner un appartement, vous le recevrez par Michelet. Je voulais qu'on lui mît un habit d'anachorète; cela n'a pas été exécuté. Si ce portrait pouvait parler, il vous dirait que personne ne vous souhaite plus de bénédictions ni ne s'intéresse plus à votre conservation que le Philosophe de Sans-Souci. Vale.
a Ce passage rappelle la Facétie à M. de Voltaire, rêve, composée par Frédéric en 1770. Voyez t. XV, p. III et 23-28, et ci-dessus, p. 201, 204 et 205.