<436>riva au bonhomme Tobie, égaré comme moi dans un canton suisse du pays des Mèdes; et le plaisant de l'affaire est qu'il est dit dans la sainte Écriture que ses petits-enfants l'enterrèrent avec allégresse;a apparemment qu'ils trouvèrent une bonne succession.
Pardonnez-moi, Sire, si, étant devenu presque aveugle comme Tobie, et misérable comme Job, je n'ai pas eu l'esprit assez libre pour oser vous écrire une lettre inutile.
Il est venu dans ma cabane un jeune baron ou comte saxon, qui s'appelle, je crois, Gersdorff. Il est très-aimable, plein d'esprit et de grâces, poli, circonspect. On dit que V. M. a pris la peine de l'élever elle-même pour s'amuser. Il y paraît; c'est Achille qui élève Phénix, au lieu qu'autrefois Phénix fut le précepteur d'Achille.
Je me mets aux pieds de V. M. De profundis.b
551. A VOLTAIRE.
(Potsdam) 25 novembre 1776.c
J'ai été affligé de votre lettre, et je ne saurais deviner les sujets de chagrin que vous avez.d Les gazettes sont muettes; les lettres de Genève et de la Suisse n'ont fait aucune mention de votre personne; de sorte que je devine en gros que l'infâme, plus infâme que jamais, s'acharne
a Tobie, chap. XIV, v. 16.
b Voyez t. XIX, p. 363.
c Le 26 novembre 1776. (Variante de la traduction allemande des Œuvres posthumes, t. X, p. 160.)
d Voltaire parle lui-même de ces chagrins dans ses lettres à madame de Saint-Julien et au comte d'Argental (du 30 octobre et du 3 novembre 1776). C'étaient des pertes pécuniaires causées par les changements arrivés dans le ministère français. Voyez les Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. LXX, p. 150-132, et p. 155.