<463> d'un homme, ne vaut-il pas mieux le tenir arrêté que de l'exécuter? La vérité est au fond d'un puits; il faut du temps pour l'en tirer, et elle est souvent tardive à paraître; mais, en suspendant son jugement jusqu'à ce qu'on soit entièrement éclairci du fait, on ne perd rien, et l'on assure la tranquillité de sa conscience, ce à quoi chaque honnête homme doit penser. Pardon de mon bavardage de légiste. C'est vous qui m'avez mis sur cette matière; je ne l'aurais pas hasardé de moi-même. Ces sortes de matières sont mes occupations journalières; je me suis fait des principes d'après lesquels j'agis, et je vous les expose.

J'oublie dans ce moment que j'écris à l'auteur de la Henriade; je crois adresser ma lettre à feu le président de Lamoignon; mais vous réunissez toutes ces connaissances; ainsi nulle matière ne vous est étrangère. Si vous voulez encore du Cujas et du Bartole des Obotrites, vous n'avez qu'à parler; je vous donnerai toutes les notions que vous désirez. C'est en faisant des vœux pour la conservation du patriarche de la tolérance que le solitaire de Sans-Souci espère qu'il ne l'oubliera pas. Vale.

564. AU MÊME.

Potsdam, 9 novembre 1777.

M. Bitaubéa doit se trouver fort heureux d'avoir vu le Patriarche de Ferney. Vous êtes l'aimant qui attirez à vous tous les êtres qui pensent. Chacun veut voir cet homme unique qui fait la gloire de notre siècle. Le comte de Falkenstein a senti la même attraction;


a Paul-Jérémie Bitaubé, membre de l'Académie de Berlin, traducteur d'Homère; il était né à Königsberg en Prusse le 24 novembre 1732. et mourut à Paris le 22 novembre 1808.