<102> paradis. Je suis très-persuadé que V. A. R. n'aura aucune difficulté à la remplacer. Elle était persuadée qu'elle descendait d'un consul romain nommé Latrono; elle aurait eu peine à trouver ce nom dans l'histoire. Je me trouve ici en terre sainte, et, par reconnaissance de l'attachement que la bonne défunte a eu pour V. A. R., je lui ferai dire douze messes pour son âme. Si ces messes arrivent, sans s'égarer en chemin, jusqu'au lieu où elle gît, elle sera bien étonnée de recevoir de ma part une telle lettre de change. Toutefois, lorsqu'on est en purgatoire, je crois qu'on reçoit avidement le passe-partout qui en fait sortir. J'en juge ainsi, madame, par les bains où je suis; je me trouve déplacé et mal à mon aise dans l'eau; j'abandonne cet élément aux turbots, aux anguilles, aux brochets, aux canards, et à leurs pareils, et je bénirai le ciel lorsque le moment de ma délivrance sera arrivé. Mon frère, en sortant d'un purgatoire semblable, a eu le bonheur d'être introduit dans votre paradis; mais, madame, au sortir des eaux je n'ai aucun aspect flatteur qui me dédommage de ces jours de pénitence et d'ennuis; tant la fatalité diversifie le destin des hommes! Je souhaite que celui de V. A. R. soit toujours heureux et comblé de prospérités. Daignez, madame, ajouter foi à l'intérêt que j'y prends, et aux sentiments d'estime et de considération avec lesquels je suis, etc.
48. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
Pillnitz, 16 septembre 1765.
Sire,
Je suis très-obligée à Votre Majesté de l'intention dans laquelle elle a voulu faire dire douze messes pour ma défunte grande maîtresse,