144. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.
24 mars 1771.
Madame ma sœur,
Je suis infiniment obligé à Votre Altesse Royale de la consultation de médecins qu'elle me communique sur le sujet de cette maladie dont elle est heureusement échappée. Comme je regarde votre personne, madame, comme la chose la plus précieuse que je connaisse, j'ai consulté ici ce que nous avons de plus habiles médecins, pour recueillir leur avis; je prends la liberté de le joindre à cette lettre. V. A. R. y verra qu'on ne juge point que les eaux lui soient convenables, et qu'on lui propose des bouillons d'herbes; j'ose y ajouter ceux de vipère, qui purifient et corrigent le sang. Avec cela, nos médecins désireraient que, si V. A. R. juge à propos de se servir des bains de Teplitz, elle daigne au moins les prendre les plus tièdes que possible. Je ne regarde point comme indifférent le parti que V. A. R. prendra à présent pour sa cure ultérieure; il est question, madame, de vous conserver aussi longtemps qu'il sera possible, et pour cela il faut se garder de ne point irriter par des remèdes forts des cicatrices tendres qui se sont faites aux lieux où V. A. R. a eu des abcès. Les plus habiles docteurs sont du sentiment unanime que, avec un peu de ménagements, V. A. R. recouvrera une santé ferme et vigoureuse; et, quoique sur un autre sujet je me ferais, madame, conscience de vous ennuyer, celui-ci m'intéresse trop. Imaginez-vous, madame, un plaideur qui veut à toute force gagner sa cause; il en étourdit les passants, les avocats et les juges. C'est mon cas; je vous supplie de me le pardonner.
Il nous est survenu des deuils de tous les côtés : le roi de Suèdea est inopinément disparu de ce monde, et un vieux margrave de
a Adolphe-Frédéric, mort le 12 février 1771.