28. AU MÊME.
(Silberberg) 25 février 1779.
Grand merci pour Cicéron; c'est une bonne nourriture pour l'âme, et que je relis toujours avec plaisir. Voilà donc la paix qui va se faire. Les prophètes font bien d'avoir de doubles prophéties : en cas que l'une ne réussisse pas, on met l'autre en avant. Deux ans de guerre, une année de guerre, après tout il faut bien que quelque chose de tout cela s'accomplisse. Mais pour la comédie,a il ne sera temps d'y penser que lorsque tous les troubles seront réellement apaisés. Que de papier il faudra barbouiller encore avant d'en venir là! Je crois bien que la paix fait plaisir à tout le monde, car le paysan, le gentilhomme, et le bourgeois, ne font que perdre quand la guerre dure. Mais cette guerre et cette paix n'ont été que des misères, l'ouvrage d'un vieillard épuisé, sans force et sans vigueur. Je me suis dit souvent ces vers de Boileau :b
Malheureux, laisse en paix ton cheval vieillissant,
De peur que tout à coup, essoufflé, sans haleine,
Il ne laisse, en tombant, son maître sur l'arène.
Adieu, mon cher; guérissez-vous de la fièvre.
Il me faut encore De natura deorum.
a Le prince Repnin proposait une actrice. Il m'avait prié à Breslau d'en écrire au Roi, ce que je fis. C'est une réponse à cette partie de ma lettre. (Note de la main de M. de Catt.)
b Épître X, vers 44-46, traduction d'Horace, Épîtres, liv. I, ép. 1, v. 8 et 9. Au lieu d'essoufflé, Boileau a mis efflanqué.