<438> Nous avons eu ici un prince de Courlandea qui a passé vingt ans en Sibérie; par tout ce qu'il en a conté, il n'a donné envie à personne d'y aller, et je crois que vous n'avez pas mal calculé en refusant de vous approcher de ce voisinage.b Je me flatte d'apprendre bientôt de meilleures nouvelles de votre santé; personne n'y prend plus de part que moi. Sur ce, etc.

25. AU MÊME.

(Landeck) 20 août 1765.c

J'ai été fâché d'apprendre la mortification qu'on vient de vous faire essuyer, et l'injustice avec laquelle on vous a privé d'une pension qui vous revenait de droit. Je me suis flatté que vous seriez assez sensible à cet affront pour ne pas vous exposer à en souffrir d'autres. Nous autres militaires ne sommes pas gens à tendre l'autre joue quand on vient de nous frapper. Ce qu'on appelle honneur dans le monde est sans doute un préjugé; mais il est établi, et c'est par cette règle que l'on juge les actions des hommes. Je vous en dirais bien davantage, si je croyais vous persuader; toutes mes raisons viennent après coup, parce que je remarque que votre parti est pris, et que vous êtes décidé. Ne croyez pas cependant que vos raisons me paraissent aussi bonnes qu'au petit cercle de vos amis qui vous entoure


a Le prince héréditaire Pierre de Courlande alla, le 13 février, rendre ses devoirs au Roi à Potsdam, et s'en retourna à Berlin le 15.

b En 1762, on avait offert à d'Alembert la place de précepteur du grand-duc de Russie. C'est à cela que le Roi fait allusion. Voyez t. XIX, p. 428.

c Voyez ci-dessus, p. 21.