<631>serve longtemps V. M. pour l'avantage de cette pauvre philosophie, persécutée ou vilipendée presque partout ailleurs que dans vos États.
Je suis avec le plus profond respect, etc.
114. A D'ALEMBERT.
30 juin 1772.
Je commence par vous féliciter de votre nouvelle dignité académique, qui montre que le mérite est encore récompensé en France, et qu'on sait discerner ceux dont les grands talents sont dignes de récompense. Vous savez que tout ce qu'Apollon promet à ses nourrissons se borne à quelques feuilles de laurier et à de l'encens. Vous en jouissez à présent dans la plus célèbre académie de l'Europe, et de là vous distribuez des brevets de grands hommes à ceux qui se distinguent parmi les nations étrangères. Je suis bien aise que notre la Grange soit de ce nombre. Je suis trop ignorant en géométrie pour juger de son mérite scientifique; mais je suis assez éclairé pour rendre justice à son caractère plein de douceur et à sa modestie.
L'approbation que vous donnez au petit discours académique lu en présence de la reine de Suède me le rend supportable, car au fond cette matière est usée; tout le monde devine ce qu'on peut dire sur un pareil sujet; il ne me restait que de présenter ce tableau sous un autre point de vue, et relativement au bien d'un État. Mes succès surpasseraient mes espérances, si ce morceau pouvait réveiller dans l'esprit des lecteurs l'amour des sciences et le goût des beaux-arts; mais je ne m'attends pas à de tels miracles. Pourvu que ce goût prenne chez nous, comme je fais tous mes efforts pour le répandre,