<692>Je suis chargé, Sire, de présenter à V. M. une requête de la part d'un jeune homme du plus grand mérite, nommé M. de Villoison,a que son profond savoir a fait recevoir à l'Académie des belles-lettres de Paris avant l'âge de vingt ans; il est à cet âge ce que les Grotius, les Petau, les Scaliger, ont été à cinquante, mais avec plus de goût et d'esprit que ces messieurs. Il serait très-flatté d'obtenir une place d'associé étranger dans l'Académie que la protection de V. M. rend si florissante. Il vient de donner un ouvrage sur Homère, que tous les savants regardent comme un prodige de savoir et de travail, et qu'il prendrait la liberté de présenter à V. M., s'il ne craignait que le grec dont cet ouvrage est hérissé ne la fît reculer deux pas en arrière. J'ose assurer à V. M. que le nom de ce rare jeune homme ne déparera point la liste de son Académie, et je lui demande cet honneur pour M. de Villoison.

Je ne sais si j'ai eu l'honneur de parler à V. M. du poëme de Guillaume, qui m'a paru intéressant et bien écrit. L'auteur désire de le perfectionner par les conseils des gens de lettres de France, qui pourront en effet lui être très-utiles; il souhaiterait en conséquence de faire le voyage de Paris; et je suis persuadé, Sire, que ce voyage serait très-avantageux pour M. Bitaubé, que son poëme y gagnerait beaucoup, ainsi que d'autres ouvrages qu'il se propose de publier, et qu'il recueillerait à Paris de nouvelles richesses littéraires dont il pourrait faire un très-bon usage dans ses travaux pour l'Académie.

J'attends, Sire, avec impatience ce Dialogue édifiant de la Vierge Marie, à qui V. M. sait que j'ai toujours eu la plus grande dévotion. J'ai lu ce Taureau blanc dont V. M. me fait l'honneur de me parler, et qui m'a fait beaucoup rire; le grand roi qui n'est plus bœuf, les prophètes changés en pies, et qui n'en parlent que mieux, et mille


a Jean-Baptiste-Gaspard d'Ansse de Villoison, célèbre helléniste, naquit à Corbeil le 5 mars 1750, et mourut à Paris le 26 avril 1805. Son édition de l'Iliade, bien supérieure à toutes les éditions précédentes, parut à Venise, en 1788, grand in-folio.