<716>çonner d'ajouter foi à de pareilles inspirations; mais ce que je crois plus volontiers, c'est que les fripons qui lui ont fait prédire la mort du pape avaient d'avance pris leurs mesures, ou étaient bien résolus de les prendre, pour que la prédiction fût vraie. Ainsi, n'en déplaise à V. M., je dirai toujours, comme Caton, qu'il faut détruire Carthage;a mais j'ajouterai que, à l'exception des empoisonneurs, s'ils sont convaincus, il serait barbare de rendre malheureux et de réduire à la misère et au désespoir les individus qui habitaient Carthage, et qu'il faut tâcher de transformer en bons et honnêtes citoyens ceux qui auraient été des jésuites ambitieux et intrigants.

J'espère que le sculpteur sera arrivé quand V. M. recevra la lettre que j'ai l'honneur de lui écrire. J'ai tout lieu de croire que V. M. sera aussi contente de sa personne qu'elle me paraît l'être de ses talents et de ses ouvrages; c'est un bon Flamand, droit et honnête, qui n'aura rien de plus à cœur que de se montrer digne des bontés de V. M. Il a dû remettre à V. M. une lettre dans laquelle je lui demande instamment une grâce, que je la prie de ne pas me refuser. C'est de vouloir bien me donner son portrait, fait à sa belle manufacture de porcelaine, et pareil au portrait en petit, très-beau et très-ressemblant, que j'ai vu entre les mains de M. Grimm. Ce portrait, Sire, sera pour moi l'étrenne la plus précieuse que j'aie reçue de ma vie, et le présent le plus cher dont V. M. puisse me gratifier et m'honorer.

Je travaillerai, Sire, avec tout le zèle possible à faire rendre justice à l'officier auquel V. M. s'intéresse. J'ai déjà fait à ce sujet, conjointement avec quelques amis honnêtes et aussi zélés que moi, mais plus considérables et plus accrédités, des démarches qui, à ce que j'espère, ne seront pas infructueuses; mais il faut du temps et de la prudence pour mener à bien cette affaire. Quand il en sera temps, je saurai faire valoir, si je le crois nécessaire, l'intérêt que V. M. veut


a Plutarque, Vie de Marcus Caton, chap. XXVII.