<522> mettrea une armoire dans sa chambre, pour qu'il y puisse placer ses livres avec commodité; et quand il sera arrivé, nous concerterons entre nous quelle façon serait la plus convenable pour sa mythologie, et celui de nous qui aura la raison de son côté gagnera sa cause.
Touchant l'abbé Gresset, je serais charmé que la gazette dît vrai; mais, jusqu'à présent, il n'y a encore rien de certain sur ce sujet, car dans la dernière lettre que j'ai reçue de Paris, l'on me marque que ledit abbé paraissait fort attaché à Paris et à la vie libre et aisée qu'on y mène. D'ailleurs, il ne saurait se mettre en chemin avant que je lui aie fait une remise d'argent pour payer les frais de son voyage. Je ne saurais donc rien vous dire de certain sur son sujet.b
Nous menons ici une vie champêtre qui me paraît plus divertissante et plus agréable que celle des plus brillantes cours; quel plaisir quand on peut se livrer à ses talents, en dépit de tous les obstacles!
Et de la même main dont nous servions Mars,
Nous venons cultiver dans ces lieux les beaux-arts.
Les études se succéderont ici les unes aux autres. Premièrement Wolff,c ce prince des philosophes, aura la préférence; ensuite Rollin,d cet auteur sage, qui, avec tant de labeur, nous transmet les événements remarquables de l'antiquité, et dont le judicieux pinceau ne sait flatter ni amoindrir les caractères de ses héros. L'aimable, l'élégant, le spirituel Voltairee vient ensuite sur leurs traces régayer de ses fleurs, fleurs que les Amours et les Grâces cueillent elles-mêmes, le sérieux et la gravité que les deux auteurs précédents inspirent.
a Le mot mettre manque dans le manuscrit.
b Voyez t. XVI, p. 303; t. XX, p. I et II, et p. 1-12.
c Voyez t. XVI, p. XI, no X, p. 195, et p. 273 et suivantes.
d Frédéric entra en relation avec Rollin au mois de janvier 1737. Voyez t. XVI, p. XIV et XV, no XV, et p. 251.
e Frédéric avait ouvert sa correspondance avec Voltaire par sa lettre du 8 août 1736, à laquelle celui-ci répondit le 26. Voyez t. XXI, p. 3 et suivantes.