3. AU MÊME.

(Oetscher) ce 12 (août 1709).

J'ai attaqué ce matin à onze heures l'ennemi. Nous les avons poussés jusqu'au cimetière des juifs,340-b auprès de Francfort. Toutes mes troupes ont donné, et ont fait des prodiges; mais ce cimetière nous a fait perdre un prodigieux monde. Nos gens se sont mis en confusion; je les ai ralliés trois fois; à la fin, j'ai pensé être pris moi-même, et j'ai été obligé de céder le champ de bataille. Mon habit est criblé de coups. J'ai deux chevaux de tués. Mon malheur est de vivre encore. Notre perte est très-considérable. D'une armée de quarante-huit mille hommes, je n'en ai pas trois mille dans le moment que je parle. Tout fuit, et je ne suis plus maître de mes gens. On fera bien à Berlin de penser à sa sûreté. C'est un cruel revers, je n'y survivrai pas. Les suites de l'affaire seront pires que l'affaire même; je n'ai plus<341> de ressources, et, à ne point mentir, je crois tout perdu. Je ne survivrai point à la perte de ma patrie. Adieu pour jamais.


340-b Voyez t. V, p. 19 et suivantes, et t. XX, p. 314.