<204>rêt, auquel nous sommes si peu susceptibles, a effectué sur moi ce que les caresses et les plaisirs les plus séduisants n'avaient pu faire? En jetant les yeux sur ces riches présents de ma maîtresse, j'ai d'abord résolu de vous en faire une offrande. Au moins, ai-je dit, la belle Biche se souviendra de moi toutes les fois qu'elle se couchera sur ce sopha; elle boira à ma santé dans cette jatte, et peut-être donnera-t-elle quelques larmes à mon absence. Aussitôt, sautant et gambadant, j'ai prié ma bonne maîtresse, qui entend parfaitement mon langage, de satisfaire mes vœux. Je lui ai dicté cette lettre. L'amitié qu'elle a pour moi l'a engagée à se donner cette peine. Recevez donc, trop aimée Biche, ce petit présent, qui seul a pu me réjouir par rapport à vous; étant couchée sur ce sopha, pensez quelquefois à votre tendre Folichon, qui ne cessera de vous aimer, de vous chérir et de remuer cent fois par jour la queue à votre honneur et gloire.
Folichon.
208. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
(Potsdam, mai 1748.)
BICHE A FOLICHON.
Je ne suis guère accoutumée à recevoir des galanteries; j'ai toujours observé la rigide chasteté des dames de mon pays et l'héroïsme romanesque, à une petite aventure près qui gâta un peu ma taille; mais je pardonne à Folichon ce que je ne passerais pas à un chien roturier. La grande tendresse que mon maître a pour sa maîtresse me détermine à prendre un chien unique pour mon amant. Oui, Folichon, je reçois non seulement vos présents, mais j'accepte votre gen-