83. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
Ruppin, 7 juin 1740.1_94-a
Ma très-chère sœur,
Vous saurez à présent tout ce de quoi il est question; ainsi j'abrége les répétitions, qui ne sauraient qu'être très-ennuyeuses et tristes. Je suis accablé d'affaires et de travail. Si je ne vous écris point aussi exactement que je le voudrais, je vous supplie de me le pardonner, car ce ne sera, en vérité, jamais par manque d'estime et d'attention que j'ai pour vous. La seule idée de pouvoir peut-être à présent vous être utile ou servir les honnêtes gens me console du fardeau<95> des affaires, qui me paraît assez pesant. Soyez persuadée, ma très-chère sœur, que je me ferai toujours un plaisir et un devoir de vous marquer en toutes les occasions la tendre amitié avec laquelle je suis à jamais votre très-fidèle frère.
1_94-a Les Mémoires de la Margrave renferment, t. II, p. 297, les passages suivants : « Un courrier que le Roi me dépêcha m'apporta cette triste nouvelle .... Je continuai d'en agir avec le Roi comme de coutume. Je lui écrivais toutes les postes, et toujours avec effusion de cœur. Six semaines se passèrent sans que je reçusse de réponse. La première lettre qui me parvint, au bout de ce temps-là, n'était que signée du Roi, et fort froide. Il commença son règne par faire une tournée dans la Poméranie et la Prusse. Son silence continuait toujours avec moi; je ne savais qu'en penser, et mon amitié pour lui ne me permettait pas d'être sans inquiétude d'une indifférence si marquée. Enfin, au bout de trois mois, je fus secrètement avertie de Berlin que le Roi en était parti incognito pour venir me surprendre à l'Ermitage, où j'étais alors. » Il vaut la peine de comparer avec ces lignes nos numéros 83 et suivants, tous exactement imprimés sur les autographes de Frédéric.