<45>çon vous instruisez les officiers, et vous n'ôtez point aux troupes la confiance qu'elles ont en leurs propres forces.
La douceur et la sévérité s'exercent alternativement avec le soldat; il faut que le général soit populaire, qu'il parle aux soldats, soit lorsqu'il passe dans leurs tentes, ou lorsque c'est un jour de marche. On voit quelquefois si la marmite va bien, on entre dans leurs petits besoins et l'on fait ce que l'on peut pour les soulager, on leur épargne des fatigues inutiles. Mais on fait tomber toute la rigueur de la loi sur le soldat mutin, sur le raisonneur, sur le pillard, et l'on fait, lorsqu'il est nécessaire, des punitions sévères aux déserteurs. En un mot, tout ce qui regarde le service doit être regardé gravement; tout ce qui est hors de là souffre de l'indulgence. On loue les officiers des belles actions qu'ils ont faites, on leur fait des honnêtetés, on leur rend service; mais on ne les épargne pas dans toutes les choses qui regardent leur devoir, et on les oblige à le faire par force quand ils le négligent. Le général ne fait pas mal de parler quelquefois guerre avec les généraux de son armée qui ont le plus de lumières; on les met sur des chapitres généraux, on entend leurs sentiments, et si, dans la liberté de la conversation, ils ouvrent un bon avis, il faut en profiter sans faire remarquer qu'on trouve la chose bonne; mais, lorsqu'elle est exécutée et qu'elle a réussi, il faut dire en présence de beaucoup d'officiers : C'est à monsieur un tel que je dois le succès de cette affaire. Vous flattez par ce moyen l'amour-propre des autres, vous les intéressez à l'avantage des affaires générales, et votre modestie, au lieu de vous attirer des envieux, vous gagne des amis.
Les Normands donnent une règle à leurs enfants : Défie-toi. - De qui? - De tout le monde. Ici c'est le cas de se défier de ses ennemis; il n'y a que des fous qui s'y confient. Mais quelquefois la sûreté vous endort, et je demande qu'un général veille toujours sur le dessein de ses ennemis; il est la sentinelle de son armée, il doit voir, entendre,