<148> donnerai dans la suite de ces Réflexions. Pourvu que l'armée de Silésie soit de soixante mille hommes, cela est suffisant. Il en faut destiner nécessairement vingt mille hommes pour la Haute-Silésie, premièrement pour favoriser la jonction des Russes, qui, ayant à passer auprès de Cracovie, trouveraient des obstacles insurmontables, s'ils n'étaient secondés de ce côté-ci; et supposons, vu la lenteur étonnante des Russes, qu'on ne parvînt pas à les mettre si vite en action, on ne pourrait pas avoir moins de vingt mille hommes dans la Haute-Silésie, ne fût-ce que pour agir sur la défensive envers le corps de Heydepiltsch et le corps de Bilitz. La position de ce corps, pour le commencement, pourrait être près du côté de Léobschütz, et il pourrait tirer sa subsistance de Cosel.
Quant à l'armée de Silésie destinée pour agir en Bohême, il faudrait donc, comme je l'ai dit, la faire agir à peu près de la façon dont on l'a employée l'année 1778. Peut-être, si l'on avait trop à craindre la supériorité de l'ennemi, pourrait-on prendre un camp à Chwalkowitz, les défilés devant soi, en faisant un flanc vers Nimmersatt; car il ne faut jamais se flatter de pouvoir attaquer le camp de l'Empereur derrière l'Elbe. Cela est démontré impossible, parce qu'il faut défiler devant un front infiniment supérieur qui vous domine et déborde de tous les côtés, où l'on serait battu selon toutes les règles de la guerre. Mais, me dira-t-on, que pourra-t-on donc entreprendre? Voulez-vous qu'on reste toute une campagne les bras croisés, et qu'on aille en Bohême plutôt à la pâture qu'à la guerre? Voici le moment où j'entre en explication des moyens dont on peut faire usage pour gagner une supériorité sur l'ennemi.
L'armée qui entre en Saxe doit marcher sans doute vers Dresde comme à l'objet principal; mais cela n'empêche pas qu'elle ne fasse d'abord un détachement de dix mille hommes par la Lusace et vers la Silésie, du côté de Greiffenberg. Toutes ces marches doivent être compassées et calculées au juste, pour que l'armée, arrivant à Dresde