<92>courent à les exécuter doivent y répondre. Il aurait convenu aux intérêts de la France qu'elle eût fait joindre l'électeur de Bavière par une armée de quatre-vingt mille hommes, tant pour terminer cette guerre en une campagne que pour avoir, par ces nombreuses troupes, une prépondérance sur ses alliés. Bien loin de prendre d'aussi sages mesures, elle n'envoya que trente mille hommes pour attaquer la reine de Hongrie dans ses États et pour écraser la puissante maison d'Autriche. Encore aurait-elle pu réussir, si, après la prise de Linz, les Français et les Bavarois étaient marchés droit à Vienne; cette capitale, presque sans défense, n'aurait pas résisté longtemps. Le roi de Prusse se serait certainement approché en hâte du Danube, et toutes les probabilités portent à croire que la France aurait dicté les lois de la paix. Ou les Français ne virent point ces avantages, ou ils raisonnèrent de travers, ce qui est très-possible, car, après la prise de Linz, ils tournèrent sans raison valable vers la Bohême. Cette faute irréparable ruina leurs grandes espérances, et fut la cause de tous les malheurs qu'ils essuyèrent dans la suite. Qu'on apprenne par là combien une fausse dialectique est pernicieuse dans ce métier, et qu'on apprenne à raisonner juste. Remarquons à cette occasion que les guerres qu'un prince entreprend loin de ses frontières réussissent rarement, parce que l'éloignement des lieux empêche les recrues, les remontes, les munitions et autres renouvellements de l'armée d'arriver assez à temps, et que les communications quelquefois interceptées empêchent de lui faire passer les secours nécessaires. Dans les guerres du genre offensif, il faut ou fournir tout ce qui est nécessaire pour de grandes entreprises, ou, si l'on en manque, il faut renoncer à ces vastes desseins.
La guerre qui se fait à forces égales est d'un genre tout différent de celle dont nous venons de parler. Il faut borner ses desseins à ses forces et ne point se hasarder d'entreprendre ce qu'on n'a pas les moyens d'exécuter. La cour peut bien ordonner au général de faire