<137>Pour mieux cacher ses vues à l'ennemi, le Roi détacha M. de Winterfeldt avec trois mille hommes au camp de Reichenau, en même temps que l'armée fit un mouvement sur sa droite pour passer l'Elbe non loin de Jaromircz, où tous ses détachements la rejoignirent. La grande armée appuya sa droite à un bois au delà de Chlum, où l'on pratiqua un abatis; sa gauche s'appuyait à l'Elbe auprès du village de Néchanitz, ayant l'avantage des hauteurs et du glacis d'un bout du camp à l'autre. M. Du Moulin repassa la Mettau avec six bataillons et quarante escadrons, et se posta à Skalitz, pour assurer la communication des vivres entre Jaromircz et Neustadt, où il y avait un bataillon en garnison. Peut-être le premier projet dont nous avons parlé aurait-il été meilleur que celui qu'on exécuta. On a su depuis, que le duc de Weissenfels n'aurait pas suivi le duc de Lorraine sur les frontières de la Moravie. De Reichenau à Glatz il n'y a que cinq milles, au lieu qu'il y en avait dix de Chlum à Schweidnitz, ce qui rendait le transport des vivres plus laborieux et plus difficile; mais les hommes font des fautes, et celui qui en fait le moins, a des avantages sur ceux qui en font plus que lui.
Tout le temps que l'armée séjourna à Chlum, ce ne fut que fourrages de la part des deux armées, et des partis de part et d'autre pour les empêcher. De tous les officiers autrichiens il n'y eut que le seul colonel Dessewffy qui se signalât à la petite guerre : il fit quelques prises, que M. de Fouqué vengea par les partis qu'il envoyait de Glatz sur les derrières de l'armée autrichienne, et qui les désolaient par de fréquentes prises qu'ils faisaient sur eux.
Il y avait un poste détaché à Smirschitz, qui mit un nouveau stratagème en usage pour intimider les Hongrois qui venaient souvent tirer sur une redoute et sur une sentinelle placée proche du pont de l'Elbe; c'est une plaisanterie qui délassera le lecteur de la gravité des matières qu'il a sous les yeux. Quelques sentinelles ayant été blessées par des pandours, les grenadiers de Kalckstein s'avisèrent de faire un