<138> mannequin, de l'habiller en grenadier, et de le placer à l'endroit où était la sentinelle; ils remuaient cette poupée par le moyen de cordes, de sorte qu'à une certaine distance on la prenait pour un homme; ils s'embusquèrent en même temps dans des broussailles voisines. Les pandours arrivent, et tirent; le mannequin tombe, les voilà qui veulent se jeter dessus; en même temps part un feu très-vif des broussailles, les grenadiers se jettent sur eux, et font prisonniers tous ceux qu'ils avaient blessés : depuis ce temps-là ce poste fut tranquille.
Mais revenons à des objets plus importants. Depuis la bataille de Friedeberg, le prince de Lorraine n'avait cessé d'importuner la cour pour qu'elle le renforçât. On lui envoya alors huit régiments, tirés en partie de la Bavière, de l'armée du Rhin, et de la garnison de Fribourg, dont l'échange venait de se faire avec les Français; mais en même temps que ces secours arrivèrent, le duc de Weissenfels le quitta, ne lui laissant que six mille Saxons, au lieu de vingt-quatre mille qu'il y avait. Voici la raison de cette retraite. Le Roi avait été informé que le roi de Pologne était en négociation avec les Bavarois, pour prendre, moyennant des subsides, six mille hommes de ses troupes à son service : ces troupes auraient pu porter une diversion funeste dans le Brandebourg. Les voies d'accommodement étaient fermées en Saxe; la seule façon de contenir cette cour était de l'intimider. Pour cet effet, le prince d'Anhalt rassembla ses troupes auprès de Halle; il fut renforcé par quatre régiments d'infanterie et trois de cavalerie que M. de Gessler lui mena de Bohême. Les Saxons pouvaient s'attendre que le prince d'Anhalt agirait offensivement contre eux; ce corps était assez fort pour les subjuguer. Un manifeste parut en même temps, dans lequel on publiait que le Roi, ayant devant lui l'exemple de la reine de Hongrie, qui avait traité en ennemis les alliés et les troupes auxiliaires du défunt Empereur, à savoir : les Hessois, les Palatins et les Prussiens, que le Roi, dis-je, se croyait autorisé à