<150> firent plus qu'un monceau de cendres. Comme on avait eu la précaution de placer les tonneaux de farine dans des caves bien voûtées, rien ne fut perdu que quelques chariots de bagage que les flammes consumèrent. Cette action inhumaine retomba sur ses auteurs, et l'Impératrice-Reine, au lieu d'y gagner, eut en Bohême une ville de plus de ruinée.
Ces tentatives n'étaient que le prélude de ce que la cour de Vienne et ses généraux méditaient depuis longtemps d'exécuter. Le prince de Lorraine voyait que les Prussiens se préparaient à quitter la Bohême; il les suivit et vint se camper à Königssaal,a pour les observer de plus près. Le camp de Staudenz n'avait pas été pris selon tout l'art : le Roi avait affaibli son armée par ses détachements, et il ne lui restait pas assez de troupes pour remplir les terrains qu'il avait à garnir. M. de Nassau était dans la Haute-Silésie; M. de Polentz, dans la Nouvelle-Marche; M. Du Moulin, à Trautenau; et, depuis que Franquini avait fait quelques tentatives sur Schatzlar, M. Du Moulin fut obligé d'y marcher, et M. de Lehwaldt le releva à Trautenau : il ne restait, après tous ces détachements, que dix-huit mille hommes dans l'armée que le Roi commandait, de sorte qu'ils ne remplissaient pas le terrain que le caprice de la nature avait formé pour son camp. Il dominait en certains endroits sur les hauteurs voisines; mais la droite était entièrement dominée par un monticule que cette petite armée ne permettait pas d'occuper : cependant on avait placé des gardes de cavalerie et des corps de hussards sur ces hauteurs, pour en être maître en cas de besoin. Mais la cavalerie ne pouvait guère aller à la reconnaissance au delà d'un demi-mille, parce que les bois, les défilés et les gorges des montagnes ne lui permettaient pas d'aller plus avant avec sûreté. L'ennemi, en revanche, envoyait tous les jours des partis de quatre à cinq cents chevaux, qui rôdaient autour du camp prussien; ils défilaient, allaient et faisaient la navette le long de la forêt de Silva,
a Königinhof.