<207> Sa Majesté, tandis que l'armée saxonne, proche de Leipzig, était destinée à faire, de concert avec le corps de troupes autrichiennes qui est sous les ordres du général comte de Grünne, une invasion dans le pays de Magdebourg, et même tout droit vers cette capitale : le Roi s'est vu forcé à regret, et bien malgré lui, de prendre les mesures les plus vigoureuses que les lois divines et humaines permettent et ordonnent même, pour détruire des desseins si dangereux, et pour ne point attendre dans le cœur de ses États des ennemis acharnés à sa perte et qui s'avançaient de tous côtés pour l'écraser. C'est dans cette fâcheuse nécessité que Sa Majesté s'est trouvée obligée d'aller au-devant de l'armée combinée autrichienne et saxonne en Lusace, pour lui couper le chemin, et l'empêcher de percer dans le cœur des États héréditaires du Roi. La Providence, qui jusqu'ici a donné des marques de sa protection si visibles au Roi contre tant d'ennemis conjurés contre lui, a bien voulu bénir encore cette fois les justes armes de Sa Majesté; et elle a non seulement eu le bonheur de défaire entièrement, à son entrée en Lusace, le corps de troupes auxiliaires saxonnes qui faisaient l'avant-garde de l'armée autrichienne, après avoir fait plus de mille prisonniers, parmi lesquels se trouvent une trentaine d'officiers avec le général de Buchner, le colonel O'Byrn et d'autres officiers de marque, outre quatre pièces de canon, trois drapeaux, deux étendards et deux paires de timbales : mais de plus Sa Majesté ayant marché ensuite du côté de Görlitz pour attaquer l'armée autrichienne, celle-ci n'a pas trouvé à propos de l'attendre; mais, après avoir abandonné son corps de troupes auxiliaires saxonnes, et un grand magasin à Görlitz, dont nos troupes se sont emparées en y faisant encore deux cents hommes et plusieurs officiers du régiment des gardes saxonnes prisonniers, le prince Charles s'est retiré avec tant de diligence et de désordre vers Zittau et les frontières de la Bohême, que ses troupes ont même pillé tous les villages saxons où elles avaient cantonné.