<95> habileté : il se vantait que la reine de Hongrie devait la Bohême à la valeur des troupes saxonnes, qui en avaient chassé les Prussiens.
Brühl, non content de ces fanfaronnades, avait surtout à cœur de brouiller le roi de Prusse avec la république de Pologne. Il faut se rappeler qu'il y a une loi sévère dans cette république contre ceux qui corrompent un membre de la diète : Brühl, à force de récompenses, engagea un staroste, nommé Wilczewski, à déclarer en pleine diète que le ministre prussien l'avait corrompu moyennant la somme de cinq mille ducats; il le fit d'un air repentant et de vérité qui aurait pu séduire; mais il fut sévèrement examiné, et confondu par ses propres dépositions. La diète de Varsovie fut rompue incontinent, après avoir rejeté l'alliance de l'Autriche et l'augmentation de l'armée.
La Pologne fourmillait alors de mécontents, comme c'est l'ordinaire dans les États républicains, où la liberté ne se soutient que par les partis différents qui contiennent alternativement l'ambition de la faction contraire. Ces mécontents offrirent au roi de Prusse de faire une confédération contre les Czartoryski, les Potocki, ou proprement contre Auguste III. C'aurait été le moyen de susciter bien des embarras au roi de Pologne; mais le roi de Prusse, qui loin de vouloir attiser le feu de la guerre, voulait l'éteindre, eut assez de modération pour conseiller à ces palatins de ne point troubler la tranquillité de leur patrie; il fit même offrir à ce roi qui l'avait tant offensé, et qui voulait retourner en Saxe, toutes les sûretés pour son passage par la Silésie. Les refus d'Auguste III ne se ressentirent pas de la politesse qui régnait autrefois à sa cour : il prit le chemin de la Moravie, province dont il méditait la conquête en 1742. Il s'aboucha avec l'Empereur à Olmütz, d'où il poursuivit son chemin par Prague pour se rendre à Dresde. Brühl et son épouse se rendirent à Vienne, où ils recueillirent les fruits de leurs iniquités.
Dès que Brühl fut de retour à Dresde, il expédia son premier commis, son homme de confiance, un certain Saul, à la cour de