<229> borna à disputer aux ennemis le passage de l'Oder; il se campa pour cet effet à Francfort.
La partie, cependant, n'était pas égale; comme le moindre échec qu'aurait souffert le corps du comte de Dohna devenait préjudiciable à l'État, et pouvait entraîner après soi la ruine totale de la Marche électorale, le Roi prit le parti de s'y rendre en personne avec un renfort assez considérable pour donner aux troupes prussiennes une espèce d'égalité avec celles des ennemis; ce renfort consistait en seize bataillons et vingt-huit escadrons. La plus grande partie de l'armée, aux ordres du maréchal Keith et du margrave Charles, demeura dans le camp de Landeshut, pour garder les frontières de la Silésie. Le Roi dirigea sa marche, par Rohnstock, Liegnitz, Heinzendorf, Dalkau, Wartenberg, Schertendorf, Crossen, Ziebingen, à Francfort, où il apprit que M. de Fermor, s'étant avancé par Landsberg à Cammin et à Tamsel, avait fait bombarder la ville de Cüstrin, qui avait été mise en cendres après avoir rejeté toutes les propositions de capitulation que le général Stoffel avait faites à M. de Schach, qui en était commandant. Ces entreprises de l'ennemi avaient engagé le comte de Dohna d'approcher son corps de cette forteresse pour la mieux soutenir. Ce fut dans ce camp près de Gorgast, le 22 août, que le Roi joignit le comte de Dohna.
Les Russes avaient établi leurs parallèles précisément au débouché de la chaussée qui conduit de Cüstrin à Tamsel, et leurs batteries étaient construites de manière que l'armée n'aurait pu déboucher de la place sans s'exposer à faire des pertes considérables, mais inutiles. Le Roi résolut cependant d'attaquer l'ennemi; il fallait se battre, afin de se débarrasser pour un temps d'une armée, et gagner celui de pouvoir se tourner d'un autre côté. Le Roi pouvait donc employer trois semaines dans cette expédition; mais comment la terminer si vite sans en venir aux mains? Le maréchal Daun, qu'on avait quitté à Jaromircz, pouvait dans cet intervalle se tourner ou vers la Silésie