<118> pour la maison d'Autriche, l'ennemie héréditaire de la France. Une voix plus respectable, celle des gens sensés, s'élevait de même contre cette guerre qui ruinait le royaume pour agrandir un ennemi réconcilié, et cette voix commençait à prendre le dessus. Mais la cour avait des vues particulières.
Il y a dans tous les États un nombre de citoyens qui, loin du tumulte des affaires, les envisagent sans passion, et en jugent par conséquent sainement, tandis que ceux qui tiennent en main le gouvernail, n'envisagent ces objets qu'avec des yeux fascinés, ne raisonnent que sur des fantômes que leur imagination leur présente, et souvent sont entraînés, par la suite d'une fausse mesure, dans un enchaînement de conséquences qu'ils n'ont pu prévoir. C'était à peu près le cas où se trouvait le ministère de Versailles. Au commencement de cette année, il donna par écrit à ses alliés une déclaration qui portait que la France, ayant fait depuis quatre ans, conjointement avec ses alliés, des efforts inutiles pour écraser le roi de Prusse, et n'ayant pu y réussir, ne se trouvait plus en état de continuer les dépenses énormes auxquelles elle avait fourni jusqu'alors; qu'en continuant la guerre on achèverait de ruiner et de dévaster l'Allemagne, qui en était le théâtre; qu'ainsi il concluait par conseiller aux autres puissances de renoncer pour cette fois à tout dessein de conquêtes et d'agrandissement, pour penser sérieusement à rétablir la paix. La même déclaration se fit, en termes plus forts encore, à Stockholm. La raison en était que, dans la diète des états assemblés dans cette capitale, le parti de la cour avait vivement attaqué la faction française, en la taxant d'avoir allumé cette guerre, de la fomenter, et d'y avoir entraîné la Suède pour sa ruine. Ainsi les sentiments pacifiques qu'étalait la déclaration française, n'avaient été faits que pour calmer les esprits agités, pour détruire les arguments dont le parti contraire s'était servi, et pour maintenir les créatures que la France soudoyait dans le sénat.
Les deux Impératrices et le roi de Pologne reçurent cette décla-