<159> maréchal Daun alarmait les Prussiens, M. de Hadik s'avançait sur les bords de la Mulde, où il s'établit depuis Nossen et Döbeln jusqu'à Rosswein. Ces postes derrière la Mulde, que les Autrichiens occupaient, sont d'un très-difficile abord. Les hauteurs étaient pour eux, dans toute l'étendue du terrain, et la rivière, dont le lit est creusé dans le roc, empêche de la passer autrement que sur les ponts de pierre qui s'y trouvent à trois endroits. S. A. R., ne se trouvant pas assez en force pour entreprendre de déloger un ennemi supérieur en nombre d'une position aussi avantageuse, se borna à bien retrancher les postes que son armée occupait, afin de s'y soutenir durant l'hiver. Les Prussiens surent si bien se faire respecter des ennemis, que tous les détachements que M. de Hadik poussa au delà de la Mulde, furent repoussés ou battus.
Le Roi, s'étant flatté que la campagne des Russes en Poméranie ne serait ni longue ni dangereuse, avait destiné M. de Platen pour la Saxe. Mais les affaires ayant pris une tournure fâcheuse, comme nous l'avons dit, M. de Platen ne put joindre l'armée de S. A. R. que le 11 de janvier. A peine fut-il arrivé à Altenbourg et à Naumbourg, pour y prendre des quartiers, que l'armée des cercles s'avança sur les lieux dont il venait de prendre possession. Il leur céda le terrain qu'il ne pouvait pas défendre; en se retirant, M. de Stojentin, colonel du régiment de Jeune-Brunswic, fut attaqué par quatre mille hommes, et il se défendit si bien, qu'il gagna Meuselwitz sans avoir fait d'autre perte que celle de ses malades, qu'il ne put emporter d'Altenbourg. Les Prussiens soutinrent leur position tout l'hiver; il y eut des alertes, que le voisinage des deux armées rendit fréquentes; mais quoi qu'il arrivât, il était si important de conserver la Saxe, dans les fâcheuses conjonctures où se trouvaient alors les affaires prussiennes, que S. A. R. risqua tout pour s'y maintenir, à quoi elle réussit, moins par la force de son armée que par ses bonnes dispositions, sa constance et sa fermeté.