<170>sonnellement militaire, et appréhendait de faire un métier duquel il n'avait aucune intelligence; il craignait surtout d'exposer aux hasards de la guerre sa fortune bien établie. Par cette raison, il s'était étroitement uni avec le mufti, pour contrarier ensemble dans le divan ceux dont les avis violents conseillaient la rupture avec la maison d'Autriche; et il leur représentait que la trêve avec les Impériaux n'étant pas expirée, on ne pouvait la violer sans transgresser la loi de Mahomet. Toutefois, par une suite des contradictions dont l'esprit humain est si susceptible, la Porte fit partir de gros détachements de Janissaires pour la Hongrie. Les forces qu'elle assembla à l'entour de Belgrad, montaient à cent dix mille hommes. Les pachas firent avancer ces troupes, et en formèrent un cordon le long des frontières des provinces appartenantes à l'Impératrice-Reine. C'était beaucoup pour la Porte; mais c'était peu pour la Prusse, à laquelle il fallait des secours effectifs. Comme cependant il n'y avait d'autre espoir à fonder en Europe que sur l'assistance de cette puissance, le Roi fit tenter de nouveau tous les moyens imaginables, tant à Constantinople qu'à Bagtcheh-Seraï, pour décider ces peuples à des partis et à des résolutions vigoureuses. L'hiver, à Breslau, il arriva un nouvel émissaire du Kan : c'était un pacha. Il confirma toutes les promesses que le barbier avait faites au Roi au nom de son maître; il assura que le Kan rassemblerait un corps de quarante mille hommes au printemps, comme cela se vérifia, et qu'il agirait ensuite comme le Roi le désirait. Cela n'eut point lieu. Nous verrons bientôt que les révolutions qui arrivèrent en Russie, firent une impression si étrange sur ces Orientaux, qu'elles arrêtèrent les mesures qu'ils étaient sur le point de prendre, et suspendirent tous leurs desseins. Le pacha cependant fut renvoyé avec des présents tant pour lui que pour son maître; car tout s'achète chez ces peuples. Le Tartare avait taxé ses actions et ses services : on lui payait tant pour une réponse favorable, tant pour assembler ses troupes, tant pour des ostentations, tant pour une