<183> mille Russes, qui devaient être joints par six mille Prussiens, étaient destinés pour cette expédition.
Le roi de Danemark, qui voyait cet orage s'amasser et prêt à fondre sur lui, avait donné le commandement de ses troupes à un officier de réputation : c'était M. de Saint-Germain. Il venait de quitter le service de France, pour quelque mécontentement que le maréchal de Broglie lui avait donné. M. de Saint-Germain se trouvait alors à la tête d'une armée indisciplinée, qui manquait d'officiers généraux capables de commander, d'ingénieurs, d'artilleurs, de train de vivres, en un mot, de tout. Il suppléa lui seul à ce qui lui manquait. Comme la caisse de guerre était mal pourvue, il rançonna la ville de Hambourg, qui lui fournit les sommes dont il avait besoin. Les ministres danois excusèrent cet étrange procédé sur la nécessité, qui n'a point de loi. M. de Saint-Germain s'approcha ensuite de Lübeck, dont il comptait s'emparer aussitôt que la guerre serait déclarée; et pour en éloigner le théâtre des frontières de son maître, il s'avança dans le Mecklenbourg avec une partie de ses troupes, et se campa, entre des marais et des étangs, dans un emplacement avantageux où probablement il aurait pu disputer aux Russes quelque temps l'entrée du Hol-stein. Nous l'abandonnerons au milieu de ses préparatifs, dont il serait superflu de faire un plus long détail, parce que cette guerre, que le Danemark craignait avec tant de raison, n'eut pas lieu, et qu'une nouvelle révolution fit tout changer à Pétersbourg.
De toutes les puissances de l'Europe, la plus consternée des événements arrivés en Russie fut la cour de Vienne. Jamais l'Impératrice-Reine n'avait porté ses espérances plus haut qu'à la fin de la dernière campagne. Tout lui présageait la subversion de la Prusse, la conquête de la Silésie, et l'accomplissement de tous ses projets. Sa persuasion était si forte, et sa sécurité, si entière, que croyant pouvoir finir la guerre en se passant d'une partie de ses troupes, elle fit une épargne déplacée en ordonnant une réforme de vingt mille hommes. Alors