<169> de forcer un prince quelconque à troquer ses États contre ces margraviats; enfin, que si un troc pareil avait lieu, il fallait que ce fût de bon gré qu'il s'arrangeât. Le Roi ajouta que ceci ne s'étant traité que verbalement, il voulait bien, pour donner à l'Impératrice des marques évidentes de ses dispositions pacifiques, minuter quelques articles principaux qui pourraient servir de base au traité qu'on se proposait de faire. Thugut s'offrit pour secrétaire; mais le Roi, qui ne se fiait ni à son style ni à ses intentions, les coucha lui-même par écrit. Certainement l'Impératrice-Reine aurait bien gagné en les acceptant. La cour de Russie ne s'était point encore déclarée; la France conseillait à l'Autriche de faire la paix; mais ses avis avaient peu d'influence sur l'esprit ardent et fougueux du jeune empereur et sur le génie impérieux du prince Kaunitz.
Voici le résumé de ce projet : l'Impératrice rendra la Bavière à l'Électeur palatin, à l'exception de Burghausen, des mines, et d'une partie du Haut-Palatinat; le Danube sera libre; Ratisbonne ne sera plus bloquée par la possession de Stadt-am-Hof; la succession de ce pays sera assurée aux héritiers légitimes de la Bavière; l'électeur de Saxe obtiendra du Palatin une somme d'argent pour les allodiaux, et la cour impériale lui cédera les droits qu'elle prétend avoir sur tous les fiefs situés en Saxe; le duc de Mecklenbourg aura, en guise de dédommagement pour ses prétentions en Bavière, quelque fief vacant dans l'Empire; la cour impériale ne chicanera plus le roi de Prusse pour la succession des margraviats; la France, la Russie et le corps germanique garantiront le présent traité.
Thugut partit pour Vienne avec cette pièce; il revint ensuite, chargé d'une foule de propositions insidieuses dont le prince Kaunitz l'avait muni. Le Roi s'aperçut, par la forme que prenait cette négociation, quelle n'était pas de nature à pouvoir réussir; il ne lui convenait pas, d'ailleurs, de traiter avec un homme du calibre de Thugut; ainsi il l'envoya au couvent de Braunau, étaler ses fourberies