<37> pour servir d'entrepôt au commerce des deux nations, une amnistie générale pour les Grecs qui avaient embrassé le parti des Russes, et, avant toutes choses, que le sieur Obreskoff fût élargi des Sept-Tours.
Des conditions aussi énormes auraient achevé de cabrer la cour de Vienne, peut-être même l'auraient-elles portée aux résolutions les plus violentes, si on les lui avait communiquées. Cette raison empêcha le Roi de lui en donner la moindre connaissance. Ce prince préféra les voies de la douceur, les plus sûres pour ne choquer personne. Il s'expliqua amicalement avec l'impératrice de Russie, sans la contredire; mais pour qu'elle sentît elle-même la difficulté qu'il y aurait à faire consentir le Grand Seigneur à l'indépendance des Tartares, il lui représenta les obstacles presque invincibles que la cour de Vienne mettrait à ce que la Russie, en possédant la Valachie et la Moldavie, devînt sa voisine, et que l'île dans l'Archipel donnerait de la jalousie et de l'envie à toutes les puissances maritimes; et il conseilla à l'Impératrice de limiter ses prétentions aux deux Cabardies, à la ville d'Asow avec son territoire, et à la libre navigation dans la mer Noire. Il ajouta que ce n'était par aucun sentiment de jalousie de l'agrandissement de l'Impératrice qu'il s'expliquait ainsi, mais dans l'unique vue qu'au moyen de ces adoucissements l'on pût parvenir à éviter que d'autres puissances, en prenant part à cette guerre, ne la rendissent générale; d'ailleurs, les Turcs étaient déjà convenus de deux points, celui d'accorder l'amnistie aux Grecs, et celui de relâcher le sieur Obreskoff.
Ces représentations, quoique fort modérées, parurent faire quelque peine à l'Impératrice; elle donna à connaître qu'elle ne s'était pas attendue à rencontrer des oppositions de la part de son meilleur allié : mais comme elle continuait d'insister sur son projet, à quelques petites restrictions près, le Roi se vit dans la nécessité de le communiquer à la cour de Vienne. Sa Majesté accompagna cette pièce de tous les adoucissements dont elle était susceptible, et pour