<38> ne point effaroucher le prince Kaunitz, il lui fit insinuer que ce n'était pas le dernier mot de la cour de Russie, qui sans doute était disposée à se relâcher sur les articles qui rencontreraient le plus de difficulté.
Les précautions que le Roi prenait, étaient d'autant plus nécessaires, que la cour impériale ne cachait plus ses projets, et que tous les mouvements qu'on voyait en Hongrie, annonçaient une prochaine rupture avec la Russie. La cour de Vienne était décidée à ne pas souffrir que le théâtre de la guerre s'établit au delà du Danube; elle espérait même qu'à la faveur d'une médiation armée, elle pourrait forcer les Russes à restituer aux Turcs la Moldavie et la Valachie, et de plus, à les faire désister de l'indépendance des Tartares, qu'ils demandaient. Dans cette vue, des troupes d'Italie, de la Flandre et de l'Autriche avaient marché en Hongrie; l'envoyé de l'Empereur s'était même expliqué sur ce chapitre assez nettement envers le Roi; il alla jusqu'à demander qu'au cas que les Russes fussent attaqués tout autre part qu'en Pologne, la Prusse dût demeurer neutre; ce qui lui fut nettement refusé. Le prince Kaunitz se flattait, à la faveur de ce plan, d'agrandir la maison d'Autriche sans quelle eût la peine de faire des conquêtes; il comptait bien que la Porte payerait cette assistance en cédant à l'Impératrice-Reine les provinces quelle avait perdues par la paix de Belgrad.
En même temps que Vienne était remplie de projets, et la Hongrie de troupes, un corps autrichien entra en Pologne, et s'empara de la seigneurie de Zips, sur laquelle la cour avait des prétentions; mais ces troupes occupèrent encore des seigneuries adjacentes sur lesquelles jamais les Empereurs n'avaient eu des droits. Une démarche aussi hardie étonna la cour de Pétersbourg, et ce fut ce qui achemina le plus le traité de partage qui se fit dans la suite entre les trois puissances. La principale raison était celle d'éviter une guerre générale toute prête à éclore; il fallait, outre cela, entretenir la balance des