<59> rappela, dans cette intention, vingt mille hommes de ses troupes qui étaient en Pologne, pour les employer à garnir et à défendre la Livonie et les provinces qu'elle croyait exposées aux insultes des Suédois; d'autre part, elle porta plus de facilités que par le passé pour reprendre avec les Turcs le congrès qui venait de se rompre.
Ce nouveau congrès s'ouvrit à Bucharest; le reis-effendi était le plénipotentiaire de la Porte, et le sieur Obreskoff, celui des Russes. Les deux ministres plénipotentiaires de la Prusse et de l'Autriche ne s'y trouvèrent point, parce que les Russes avaient été mécontents du sieur Thugut, qui avait assisté au premier congrès comme ministre de l'Impératrice-Reine. Les Russes commencèrent par renouveler leurs prétentions exorbitantes; ensuite ils se relâchèrent sur plusieurs articles : mais la cession des places de la Crimée, Kertsch et Jenikale, situées sur le détroit de Zabache, dont la possession ouvrait aux Russes le passage de la mer Noire, fut un obstacle invincible à la conclusion de la paix; le corps des ulémas, ou gens de la loi, déclara au Grand Seigneur qu'il ne consentirait jamais que, par cette cession, on mît la Russie en état d'équiper une flotte qui menacerait Constantinople même du plus imminent danger. La Russie déclara, de son côté, que la possession de ces deux places était une condition dont elle ne se départirait jamais. Sur cela, chacune des deux cours envoya son ultimatum à ses plénipotentiaires : les Russes offrirent de se relâcher sur ce qu'ils avaient demandé en argent, à condition que les Turcs consentissent au reste; et les Turcs offrirent vingt millions de roubles aux Russes, s'ils voulaient remettre les choses sur le pied où elles étaient avant le commencement de cette guerre. Après que les conditions eurent été refusées de la part des Turcs et de celle des Russes,a vers la fin du mois de mars, ce second congrès fut rompu comme le premier.
Deux raisons influèrent à rendre ce congrès infructueux : la pre-
a Les mots de Turcs et de celle des Russes sont omis dans l'autographe.