<249> patrie, et l'unique volonté qui lui convienne est d'opérer quelque chose d'utile et de grand pour le bien de l'État. C'est à quoi il doit sacrifier son amour-propre et toutes ses passions, et profiter de tous les avis, de tous les secours et de tous les grands hommes qu'il trouve, en un mot, de tout ce qui est capable de contribuer à l'exécution de ses bonnes intentions pour le bonheur de ses sujets.
Les puissances qui peuvent se passer de troupes mixtes ou d'auxiliaires font bien de les exclure de leurs armées; mais comme peu de princes de l'Europe sont dans une pareille situation, je crois qu'ils ne risquent rien avec les auxiliaires, tant que le nombre des nationaux leur est supérieur.
Machiavel n'écrivait que pour de petits princes. Son ouvrage n'est composé que de concetti politiques; il n'y a presque pas un endroit où l'auteur n'ait l'expérience contre lui. Je pourrais alléguer une infinité d'exemples d'armées composées d'auxiliaires, qui ont été heureuses, et de princes qui se sont bien trouvés de leurs services.
Ces guerres de Brabant, du Rhin et d'Italie, où l'Empereur, réuni avec l'Empire, l'Angleterre et la Hollande, gagnait des batailles sur les Français, les chassait d'Allemagne et d'Italie, et les matait en Flandre, ces guerres ne se firent qu'avec des auxiliaires. L'entreprise par laquelle trois rois du Nord dépouillèrent Charles XII d'une partie de ses États d'Allemagne s'exécuta pareillement avec des troupes de différents maîtres réunis par des alliances; et dans la guerre de l'année 1734, que la France commençaa sous le prétexte de soutenir les droits de ce roi de Pologne toujours élu et toujours détrôné, les Français joints aux Savoyards firent la conquête du Milanais et de la plus grande partie de la Lombardie.
Que reste-t-il à Machiavel après tant d'exemples, et à quoi se réduit l'allégorie, tout ingénieuse qu'elle est, des armes de Saül, que David refusa à cause de leur pesanteur, lorsqu'il devait combattre
a Voyez t. I, p. 189 et 190.