<60>Le discours de Potier aux factieuxa est aussi beau par la justesse des sentiments que par la force de l'éloquence. L'auteur fait parler un grave magistrat dans l'assemblée de la Ligue. Il s'oppose courageusement au dessein des rebelles, qui voulaient élire un roi d'entre eux; il les renvoie à la domination légitime de leur souverain, à laquelle ils voulaient se soustraire; il condamne toutes les vertus des séditieux, en tant que vertus militaires, puisqu'elles devenaient criminelles dès lors qu'ils en faisaient usage contre leur roi. Mais tout ce que je pourrais dire de ce discours ne saurait en approcher; il faut le lire avec attention; je ne prétends qu'en faire remarquer les beautés à ceux des lecteurs auxquels elles pourraient échapper.
Je passe à la guerre de religion qui fait le sujet de la Henriade. L'auteur a dû exposer naturellement les abus que les superstitieux et les fanatiques ont coutume de faire de la religion; car on a remarqué que, je ne sais par quelle fatalité, ces sortes de guerres ont toujours été plus sanglantes, plus opiniâtres que celles que l'ambition des princes ou l'indocilité des sujets ont suscitées; et comme le fanatisme et la superstition ont été de tout temps les ressorts de la politique détestable des grands et des ecclésiastiques, il fallait nécessairement y opposer une digue. L'auteur a employé tout le feu de son imagination, et tout ce qu'ont pu l'éloquence et la poésie, pour mettre devant les yeux de ce siècle les folies de nos ancêtres, afin de nous en préserver à jamais; il voudrait purifier les soldats et les camps des arguments pointilleux et subtils de l'école, pour les renvoyer au peuple pédant des scolastiques; il voudrait arracher pour toujours aux hommes le glaive saint qu'ils prennent sur l'autel et dont ils égorgent impitoyablement leurs frères. En un mot, le bien et le repos de la société fait le principal but de ce poëme, et c'est pourquoi l'auteur
a Chant VI, v. 83-134.