<61> avertit si souvent d'éviter dans cette route l'écueil dangereux du fanatisme et du faux zèle.
Il paraît cependant, pour le bien de l'humanité, que la mode des guerres de religion est finie, et ce serait assurément une folie de moins dans le monde; mais j'ose dire que nous en sommes en partie redevables à l'esprit philosophique qui, depuis quelques années, prend beaucoup le dessus en Europe : plus on est éclairé, et moins on est superstitieux. Le siècle où vivait Henri IV était bien différent. L'ignorance monacale, qui surpassait toute imagination, et la barbarie des hommes qui ne connaissaient d'autre occupation que celle d'aller à la chasse et de s'entre-tuer, donnaient accès aux erreurs les plus palpables. Marie de Médicisa et les princes factieux pouvaient donc alors abuser d'autant plus facilement de la crédulité des peuples, que ces peuples étaient grossiers, aveugles et ignorants.
Les siècles polis qui ont vu fleurir les sciences n'ont point d'exemples à nous présenter de guerres de religion, ni de guerres séditieuses. Dans les beaux temps de l'empire romain, je veux dire vers la fin du règne d'Auguste, tout cet empire, qui composait presque les deux tiers du monde, était tranquille et sans agitation. Les hommes abandonnaient les intérêts de la religion à ceux dont l'emploi était d'y vaquer, et ils préféraient le repos, les plaisirs et l'étude à l'ambitieuse rage de s'égorger les uns les autres, soit pour des mots, soit pour l'intérêt, ou pour une funeste gloire.
Le siècle de Louis le Grand, qui peut être égalé sans flatterie à celui d'Auguste, nous fournit de même un exemple d'un règne heureux et tranquille pour l'intérieur du royaume, mais qui malheureusement fut troublé vers la fin par l'ascendant que le père Le Tellier prit sur l'esprit de Louis XIV, qui commençait à baisser; mais c'est proprement l'ouvrage d'un particulier, et l'on n'en saurait charger
a Catherine de Médicis.