<153>étroits, qui devaient être d'autant plus durables, qu'ils étaient soutenus par leurs intérêts particuliers. Cette conformité de sentiments donna lieu au traité de Hanovre.

La forme du traité était défensive, et roulait sur des garanties réciproques. La France et l'Angleterre s'engageaient d'une façon vague, et susceptible de toutes sortes d'interprétations, d'employer leurs bons offices, pour que les droits de la Prusse sur la succession de Berg ne reçussent aucune atteinte après la mort de l'Électeur palatin. La Suède, le Danemark et la Hollande accédèrent ensuite à ce traité. La France et l'Angleterre en voulaient effectivement à la maison d'Autriche. Dans cette intention, ils espéraient se servir du Roi pour enlever la Silésie à l'Empereur. Frédéric-Guillaume n'était pas éloigné de se charger de l'exécution de ce projet : il demandait qu'on joignît une seule brigade des Hanovriens à ses troupes, afin de ne pas s'engager tout seul dans une entreprise aussi importante, ou que les alliés convinssent avec lui d'une diversion qu'ils feraient d'un autre côté, en même temps qu'il commencerait les opérations en Silésie. Quoique cette alternative parût raisonnable, le roi d'Angleterre ne voulut jamais s'expliquer sur cette matière.

A peine les alliés eurent-ils signé leur traité à Hanovre, qu'une autre alliance se fit à Vienne entre l'Empereur, le roi d'Espagne, le Czar, et quelques princes d'Allemagne. C'est par le moyen de ces grandes alliances qui séparent l'Europe en deux puissants partis, que la balance des pouvoirs se soutient en équilibre, que la force des uns tient la puissance des autres en respect, et que la sagesse des habiles politiques prévient souvent des guerres, et maintient la paix, lors même qu'elle est sur le point d'être rompue.

Dès que le Czar eut signé le traité de Vienne, il fit de fortes remontrances au roi de Prusse sur le parti qu'il avait pris, lui insinuant, avec ces espèces de menaces auxquelles les expressions polies servent de véhicule, qu'il ne verrait pas indifféremment que les États héréditaires de l'Empereur fussent attaqués.

Pierre Ier mourut dans ces circonstances, laissant dans le monde plutôt la réputation d'un homme extraordinaire que d'un grand homme, et couvrant les cruautés d'un tyran des vertus