<166>présentèrent une adresse au Roi pour demander la suppression du bill. Quoique le parlement fût entouré de gardes, le peuple s'attroupa en grand nombre; il jetait des cris séditieux, et commençait à faire des avanies aux gens du Roi : il ne leur manquait qu'un chef, et la révolte éclatait. Walpole, qui vit que cette affaire devenait sérieuse, jugea qu'il fallait céder; il cassa le bill sur le champ, et sortit du parlement, couvert d'un mauvais manteau qui le déguisait, en criant : « liberté! liberté! et point d'accises! » Il trouva le Roi à Saint-James, qui s'armait de toutes pièces : il avait mis son chapeau qu'il portait à Malplaquet; il essayait son épée avec laquelle il avait combattu à Oudenarde, et il voulait se mettre à la tête de ses gardes, qui s'assemblaient dans la cour, pour soutenir avec fermeté l'affaire des accises. Walpole eut toutes les peines du monde à modérer son impétuosité, et il lui représenta avec la généreuse hardiesse d'un Anglais attaché à son maître, qu'il n'était pas temps de combattre, mais bien d'opter entre le bill et la couronne. Enfin le projet de l'accise tomba; et le Roi, très-mécontent de son parlement, se défia de son autorité, dont il avait pensé faire une triste expérience. Ces troubles intérieurs l'empêchèrent alors de se mêler de la guerre d'Allemagne.
Nous avons dit que Kehl avait été pris par les Français, et que la rupture était ouverte. L'Empereur, à qui la France avait donné si beau jeu, n'eut point de peine à faire déclarer l'Empire en sa faveur. Il demanda au Roi les secours stipulés par l'alliance de 1728, et il menaçait qu'en cas de refus, il rétracterait la garantie qu'il avait donnée du duché de Berg. Le Roi, qui était demeuré neutre dans les troubles de la Pologne, quoique ses intérêts le sollicitassent en faveur de Stanislas, se déclara dans cette occasion pour l'Empereur, quoique ses intérêts y fussent contraires. Il n'avait d'autre politique que la probité, et il observait ses engagements si scrupuleusement, que son avantage ni son ambition n'étaient jamais consultés lorsqu'il s'agissait de les remplir. En conséquence de ces principes, il fit marcher dix mille hommes au Rhin, qui servirent pendant cette guerre sous le prince Eugène de Savoie.
Au commencement du printemps, le maréchal de Berwick