<194>la propreté, qui de soi-même est utile, dégénéra en abus ridicule. Si la paix avait duré au delà de l'année 1740, il est à croire que nous en serions à présent au fard et aux mouches; mais ce qui était plus déplorable encore, c'est que les grandes parties de la guerre étaient tout à fait négligées, et que notre génie se rétrécissait de jour en jour davantage par les petits détails.
Malgré tous ces abus, l'infanterie était bonne; il y régnait une discipline sévère et un grand ordre : mais la cavalerie était absolument négligée; le Roi, qui s'était trouvé à la bataille de Malplaquet, avait vu repousser par trois fois celle des Impériaux; et, dans les siéges de Menin, de Tournai, et de Stralsund, où il se trouva, il n'y avait aucune occasion pour la cavalerie de briller. Le prince d'Anhalt était à peu près dans des préjugés semblables : il ne pouvait pardonner à la cavalerie de Styrum la défaite de la première bataille de Höchstädt;a et il s'imaginait que cette espèce de milice était si journalière, qu'on ne pouvait pas compter dessus. Ces malheureux préjugés furent si funestes à notre cavalerie, qu'elle demeura sans discipline, et qu'elle ne fut par conséquent d'aucun usage, lorsque dans la suite on voulut s'en servir.
Les officiers d'infanterie s'appliquèrent beaucoup à leur métier : ceux de la cavalerie, presque tous répandus dans les petites villes, avaient moins d'intelligence et de vivacité que les autres. Parmi les généraux, il y avait plus de braves gens que de gens de tête; le prince d'Anhalt était d'eux tous l'unique capable de commander une armée : il le savait, et il tirait tout le parti qu'il pouvait de sa supériorité, afin de se faire rechercher davantage, et de primer sur les autres.
Pendant le règne du Roi, les fortifications de Magdebourg et de Wésel s'achevèrent, et celles de Stettin furent commencées sous la conduite du colonel Walrave, mais dirigées par le prince d'Anhalt.
a La cavalerie prussienne se distingua à la première rencontre qui eut lieu près de Höchstädt, sous les ordres du général de Natzmer; elle se comporta d'une manière plus brillante encore à la bataille de Blenheim. sous les ordres du prince héréditaire Frédéric de Hesse-Cassel; mais le prince de Dessau a été accusé d'avoir négligé la cavalerie, qui néanmoins contribua beaucoup à sa victoire de Kesselsdorf.