<85>Guillaume était également admirable à la tête de ses armées, où il paraissait comme le libérateur de sa patrie, et à la tête de son conseil, où il administrait la justice à ses peuples. Ses belles qualités lui attiraient la confiance de ses voisins; son équité lui avait élevé une espèce de tribunal suprême qui s'étendait au delà de ses frontières, et d'où il jugeait ou conciliait des souverains et des rois. Il fut choisi médiateur entre le roi de Danemark et la ville de Hambourg; Christian V reçut cent vingt-cinq mille écus de cette ville, qui était une éponge que les Danois pressaient dans le besoin; elle aurait été mise à sec, sans l'appui de Frédéric-Guillaume.

L'Orient rendit un hommage à ce prince, dont la réputation avait pénétré jusqu'aux frontières de l'Asie : Murad Ghérai, kan des Tartares, rechercha son amitié par une ambassade. L'interprète du Budgjak avait un nez de bois et point d'oreilles; et l'on fut obligé d'habiller l'ambassadeur, dont les haillons ne couvraient pas la nudité, avant que de l'admettre à la cour.

L'Électeur, recherché des Tartares, se fit respecter des Espagnols. Cette cour lui devait des subsides dont il ne pouvait obtenir le payement : il envoya vers la Guinée neuf petits vaisseaux dont il s'était servi dans la Baltique; et cette escadre médiocre enleva un gros vaisseau de guerre espagnol, qu'elle conduisit dans le port de Königsberg.

Environ dans ce temps, Frédéric-Guillaume entra en possession du duché de Magdebourg, qui fut à jamais incorporé à l'électorat de Brandebourg, après la mort du dernier administrateur, qui était un prince de la maison de Saxe.

L'Électeur eut depuis, comme directeur du cercle de Westphalie, la commission impériale de protéger les états de l'Ost-Frise contre leur prince, qui les chicanait sur leurs priviléges; et comme il avait le droit de succession éventuelle sur cette principauté, il profita de cette occasion pour mettre garnison brandebourgeoise à Gretsyhl, et il établit à Emden une compagnie de négociants, qui commercèrent en Guinée et y bâtirent le Grand-Friedrichsbourg.

Ces petits progrès n'étaient pas comparables à ceux de Louis XIV : ce monarque avait fait de la paix un temps de