<172>Le nez camard, bras et poitrine nue,
Gens faits exprès pour inspirer l'horreur,
Portant en main leur lance à pointe aiguë,
Et remplissant les airs de leur clameur.
Des Prussiens bientôt la garde alerte,
Toujours au guet, les découvrit de loin,
Foulant aux pieds l'herbe encor fraîche et verte.
Au général on députe sans perte,
Pour les secours dont on avait besoin.
Il vient, il voit la campagne couverte
D'Autrichiens; un des Hongrois déserte :
« Ce jour sans coups ne se passera point;
Le duc lorrain veut prendre la licence
D'escamoter par un sien partisan
Je ne sais quel ambassadeur de France,
Qu'on nous a dit gîter dans votre camp. »
Il dit, et part; le prince, dans l'instant,
Par le hussard averti de la chose,
Aux ennemis un gros des siens oppose,
De ses dragons, de ses chevau-légers.
Parmi ceux-là se distingue la bande
Que l'intrépide et preux Chasota commande,
Tous vieux soldats, dans les combats experts,
Qui, débandés, voltigeant dans la plaine,
Se ralliant plus prompts que les éclairs,
Tous réunis, suivent leur capitaine,
Sur l'ennemi, qui parfois les attend,
Viennent tomber impétueusement,
Et par leurs coups portent la mort certaine.
Les deux partis s'approchent lentement;
Tout ce que peut et l'adresse et la ruse,
L'invention et les subtilités,
Se pratiquait alors des deux côtés.
Le Prussien voit que l'Hongrois l'amuse,
Et l'Hongrois voit ses desseins éventés.
Sur le talus d'une double colline,


a Voyez t. III, p. 129 et 160 : t. X, p. 217 : et ci-dessus, p. 27.