<78>Que cet exemple vous rappelle
Tout le sublime et la grandeur
De la tendresse fraternelle.
Ah! mon auguste sœur, pour chanter votre nom
Je laisse aux eaux de l'Hippocrène
Les soins de ranimer une vulgaire veine,
Et les Muses de l'Hélicon
Ne sont pas les dieux que j'invoque.
Plein d'une amitié réciproque,
Mon cœur me tient lieu d'Apollon;
Pour exprimer comme il vous aime,
Pour s'ouvrir ou se dévoiler,
Le sentiment suffit, il se peint de lui-même,
Et c'est à lui seul de parler.
Éclatez, doux transports de ma reconnaissance;
Portez au bout de l'univers
Le récit des complots de tant de rois pervers
Qui préparaient ma décadence,
Et le récit de la constance
D'une sœur qui pendant mes plus affreux revers
De tous mes ennemis a bravé la puissance,
Et voulut par persévérance
Partager avec moi le triomphe ou les fers.
Publiez ses vertus au delà des déserts
Où le Guèbre à genoux adore
Les rayons naissants de l'aurore,
Les portant, au delà des mers
Où Neptune étend son empire,
Jusqu'aux lointains climats où le soleil expire;
Et que d'un pôle à l'autre on entende en tous lieux
Qu'un mérite aussi grand, si digne qu'on l'admire,
L'élève jusqu'au rang des dieux.
Ces sentiments, ma sœur, avec des traits de flamme
Sont gravés au fond de mon âme.
Vainqueurs de l'absence et du temps,
Ils seront fermes et constants