AU PRINCE FRÉDÉRIC DE BRUNSWIC.
Les fruits nés dans les sols arides
De Berlin et de Sans-Souci,
Quand tout a le mieux réussi,
Ne valent pas les fruits splendides
Du beau jardin des Hespérides :
Ils étaient d'or, et leurs appas
Éblouissaient les cœurs avides,
Qui préféraient ces biens solides
A des fruits bien plus délicats.
Virgile, aux chants de l'Énéide,a
Nous peint d'un trait de son pinceau
Énée, ayant Vénus pour guide,
A peine hors de son vaisseau,
Qu'il trouve au milieu des bois sombres
La pomme d'or et le rameau;
Il le saisit, un don si beau
Fut pour le roi des pâles ombres.
Pour moi, si par faveur du sort
Je cueillais un fruit aussi rare,
Je n'offrirais pas ce trésor
Au noir souverain du Ténare;
Mais vous auriez la pomme d'or.
(1774.)
a Livre VI, vers 136 et suivants.