<309>qu'un jeune homme qui a du génie réussira mieux en se parant de quelque bon mot d'Horace qu'en débitant un théorème d'Archimède.
BARDUS.Mon cher ami, .. j'en suis fâché, .. vous avez l'esprit gâté par cette étude, qui ne demande que du génie. Nous autres, nous méprisons une application aussi frivole; nous sommes les scrutateurs de la nature, et nous approfondissons les choses, quand vous ne faites que glisser sur leur superficie. D'un côté par le calcul, et de l'autre par nos systèmes métaphysiques, nous arrachons ce que l'auteur de l'univers voulait dérober aux hommes. Vous arrangez des mots, nous recherchons des vérités; c'est là le caractère des grands hommes; ils sont amants passionnés des vérités, et ils sont toujours occupés à en découvrir de nouvelles.
ARGAN.Il me semble qu'après les avoir trouvées, et vos géomètres, et vos métaphysiciens ne s'accordent pas toujours sur les faits.
BARDUS.C'est que les uns n'y entendent rien.
ARGAN.Qui nous répondra donc de l'intelligence des autres?
BARDUS.Les calculs et l'algèbre.
ARGAN.Pour l'algèbre, j'espère bien que vous ne l'aurez pas fait apprendre à votre fils.
BARDUS.Vous radotez, je crois; je lui ai fait apprendre le latin, le grec, l'hébreu, le syriaque, le cophte et les éléments du chinois, pour que, sachant écrire en toutes ces langues, sa correspondance en devienne plus utile à l'État.