<106>charmes de son éloquence victorieuse. Le véritable Pompée et celui dont il parlait n'étaient pas le même homme; car, messieurs, qu'était-ce que Pompée, en comparaison de notre célèbre artisan? L'un conduisit des troupes au rebelle et sanguinaire Sylla; l'autre était soumis au maître chez lequel il apprit son métier, et à ses magistrats, sans se mêler de cabales. L'un, aussi ambitieux que vain, usurpait la réputation de Lucullus dans la guerre de Mithridate, de Métellus dans la guerre d'Espagne, et de Crassus dans celle des gladiateurs; l'autre, aussi modeste qu'habile, cédait l'ouvrage aux autres maîtres ses confrères, et communiquait ses talents à ses élèves. L'un se laissait tromper et surprendre par César; l'autre ne trompa et ne fut surpris de personne. Pompée enchaînait des rois, saccageait des provinces, et brûlait des villes; Matthieu Reinhart servait des rois, ne commit jamais de violence, et éteignait des incendies. L'orgueil du Romain ne pouvait souffrir même d'égal; l'humilité de l'Allemand s'appliquait à élever des rivaux. Le héros du sénat fut vaincu par César; l'artisan célèbre ne fut battu de personne. Pompée se brouilla avec ses amis; Reinhart cultiva toujours l'amitié des siens. L'un périt d'une mort violente; et l'autre finit tranquillement d'une mort naturelle. Si Pompée avait triomphé de César, il aurait également assujetti Rome; Matthieu Reinhart triompha de tous ses confrères, et ne pensa, je le proteste, jamais à dominer.

Seconde partie.

Mais, messieurs, combien d'exemples n'a-t-on pas que ces foudres de guerre, après avoir à la vérité défendu leur patrie, en sont devenus les fléaux en temps de paix! Au lieu que l'excellent citoyen dont je parle était encore plus merveilleux dans sa vie privée que dans cette partie de sa vie qu'il consacrait au public. Qu'il est rare, mais qu'il est heureux de voir les grands talents joints au mérite solide, et les qualités brillantes uniesa aux mœurs aimables et douces! La plupart des hommes sont un


a Qu'il est heureux quand les grands talents sont joints au mérite solide, et que les qualités brillantes sont unies, etc. Variante de l'exemplaire de la Bibliothèque royale, p. 15.